Le vignoble de Faugères, qui s’étend sur 1800 hectares sur les coteaux schisteux des avants-monts du haut Languedoc en Hérault, ne s’est développé que récemment. Son terroir n’est délimité qu’en 1948, et l’AOC date de 1982.
Pas de cours d’eau en surface, mais le sol, schisteux, retient l’humidité, et la vigne puise en profondeur. (voir un article développant les qualités du schiste là)
à gauche, le schiste bleu au mas des Capitelles
Les cépages principaux en rouge sont la syrah, le grenache noir, le carignan et le mourvèdre . L’assemblage est libre, mais obligatoire. Roussane et vermentino pour le blanc. Le climat est méditerranéen, avec des nuits fraiches.
Ce terroir a ainsi bien des qualités pour donner des grands vins.
L’ami Michel, grand-maître de la commanderie du Faugères, nous a fait découvrir le domaine Mas des Capitelles, l’un des plus qualitatifs, qui privilégie le carignan.
Les frères Cedric et Brice nous reçoivent. A la suite de leur père Jean, ils ont pris les rênes de ce domaine de 28 hectares, sorti de la coopérative en 1999.
Les capitelles sont ces cabanes de pierre sèches servant d’abri dans les garrigues. Brice en a construit une l’hiver dernier
Les frères sont un peu artistes, voici la 4ème dimension vue par Cedric.
et un arbre mobile (ça tourne) vu par Brice.
Ici le Carignan est roi. Taillé en gobelet, les vieilles vignes donnent peu (20-30 hl à l’hectare) mais bon.
Aeration des sols, biodynamie, décoctions de plantes, tri sur souche, utilisation de levures neutres : c’est la qualité qui est recherchée, et la garde.
Les prix s’en ressentent, évidemment. Voici la gamme des vins produits.
Heureusement, on trouve des vins de Faugères à des prix bien plus doux, que l’on peut déguster à la cave coopérative Vilavigne.
Nous avons bien aimé le Parfum, du mas Olivier, médaillé d’Or au concours international de Lyon 2022
Nous avons bien aimé aussi La Jasse d’Aimé Rouge 2023. Rapport qualité/prix incroyable. Allez à Faugères !
Mon ami Jean Dessirier, que les lecteurs du Bon Clos connaissent bien, se plait parfois à poser des questions embarrassantes auxquelles je réponds comme je peux. Ce franc-comtois natif de Clamart, un des plus gros fournisseurs de raisin du Clos de Clamart, nous régale de ses oeuvres qui magnifient le bois, le zinc, ou le simple papier.
Encore dimanche dernier il exposait chez Tschann, et dès le mois de mars il devrait exposer au Centre Chanot à Clamart.
Première question embarrassante :
Pourquoi les vins de Bordeaux sont-ils plus tanniques que les vins de Bourgogne ?
Je répondis temps de macération, cépages, bois neuf… ChatGPT fut plus disert :
« Les vins de Bordeaux sont généralement plus tanniques que ceux de Bourgogne en raison de plusieurs facteurs liés aux cépages, au climat et aux techniques de vinification.
1. Les cépages utilisés
• À Bordeaux, les vins rouges sont principalement élaborés à partir de Cabernet Sauvignon, Merlot, Cabernet Franc, Petit Verdot et Malbec. Le Cabernet Sauvignon, en particulier, est un cépage riche en tanins, ce qui confère aux vins de Bordeaux leur structure tannique marquée.
• En Bourgogne, le cépage rouge dominant est le Pinot Noir, qui est naturellement moins tannique que le Cabernet Sauvignon. Il produit des vins plus délicats et moins structurés.
2. Le climat et les conditions de culture
• Bordeaux bénéficie d’un climat océanique tempéré avec des étés relativement chauds et humides, ce qui favorise une maturité phénolique plus lente et l’extraction de tanins plus présents.
• La Bourgogne, avec son climat plus frais et continental, permet au Pinot Noir de mûrir plus rapidement sans développer autant de structure tannique.
3. Les techniques de vinification et d’élevage
• À Bordeaux, la macération est souvent plus longue, ce qui favorise une extraction plus importante des tanins de la peau et des pépins des raisins.
• L’élevage en fûts de chêne est également une pratique courante à Bordeaux, où l’utilisation de barriques neuves accentue encore la structure tannique.
• En Bourgogne, la vinification met davantage l’accent sur l’expression du fruit et du terroir, avec des extractions plus douces et un usage plus modéré du bois neuf.
4. Les styles de vin recherchés
• Les vins de Bordeaux sont souvent conçus pour être des vins de garde, nécessitant plusieurs années pour assouplir leurs tanins et atteindre leur apogée.
• Les vins de Bourgogne, bien que pouvant aussi vieillir, misent davantage sur la finesse et l’élégance dès leur jeunesse.
En résumé, les vins de Bordeaux sont plus tanniques principalement à cause du Cabernet Sauvignon, du climat, des méthodes d’extraction et de l’élevage en fût, tandis que la Bourgogne produit des vins plus fins et soyeux grâce au Pinot Noir et à une vinification plus délicate. »
Impressionnant, non ?
On a cité le climat, ce mot a aussi une acception relative au terroir. Et voici la deuxième question :
Depuis quand le mot climat est-il utilisé pour désigner un terroir viticole ?
Je répondis Bourgogne, fin du Moyen Age, clos et crus…
Réponse de Chatgpt :
L’usage du mot “climat” pour désigner un terroir viticole remonte au Moyen Âge, et il est particulièrement ancré en Bourgogne. Dès le XIVᵉ siècle, des documents mentionnent des “climats” pour distinguer des parcelles de vigne aux caractéristiques spécifiques.
L’emploi du terme s’est formalisé avec le temps pour désigner des unités de terroir bien définies, intégrant des éléments comme le sol, l’orientation, le microclimat et le savoir-faire humain. La notion de “climat” en Bourgogne a atteint une reconnaissance internationale en 2015, lorsque les Climats du vignoble de Bourgogne ont été inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Ainsi, même si le mot “climat” a pris son sens actuel lié à la météo dès l’Antiquité, son usage viticole spécifique remonte au moins au Moyen Âge et s’est consolidé progressivement jusqu’à aujourd’hui.
C’est époustouflant. Avec l’IA on va finir par tout savoir, les sceptiques diront sans rien retenir.
Dans le Tarn, à quelques kilomètres au nord de Gaillac, à Broze, il est un musée qui présente une extraordinaire collection d’objets liés au vin et à la viticulture, l’InVINcible VIGNEron.
Elle est l’oeuvre de Theo Elzinga, un ci-devant vigneron dans le Muscadet, passionné par les objets du vin, qui a déménagé sa collection il y a une dizaine d’années pour ouvrir ce musée. Il comptait à l’époque quelques 8000 objets, il en compte plus du double aujourd’hui. Voir ici l’article que la Dépêche lui consacra à l’époque.
Nous avons pu le visiter, guidés par Manu, son gendre, en compagnie d’Henri Plageoles et de Michel Houdet, respectivement Grand-Chancelier et Commandeur de la Confrérie de la Dive Bouteille de Gaillac, et de nos amis Daniel Fréry, conservateur du Musée du Vin de Paris, et Pierre Jobard son adjoint.
Une impressionnante collection de plaques de cheminée accueille le visiteur.
Les anciennes cuves de ce bâtiment viticole sont intelligemment adaptées pour abriter des collections
Au fil des salles s’alignent les outils de vignerons, tonneliers, distillateurs, buveurs, publicitaires et des oeuvres artistiques, comme ce tableau représentant le port de Gaillac en 1863, dû au peintre Gordon Frickers,
ou cette scène de danse dans les vignes de Robert Rolland, un peintre et aquarelliste lyonnais.
On reconnait avec plaisir l’ habit de tonnelier de Nicolas de l’Armessin, déjà rencontré, des scènes de vendanges
des représentations religieuses,
un vendeur ambulant de vin, métier disparu
Il y a des statues de toutes sortes et de tout matériaux ( bronze, bois, céramique…) comme ces personnages bachiques
ce vigneron à la serpe
ces personnages « à cheval sur mon tonneau »
et ces figures féminines
Belle collection d’affiches publicitaires pour les vins et liqueurs
Qui connait encore cette Pimprenelle, censée remplacer le vin ?
Les produits phytosanitaires ne sont pas en reste
Voici encore des objets décoratifs : enseigne, assiettes, pendule, tonnelets,etc.
Les franciliens apprécieront cette assiette qui vante le vin de Suresne
Il y a bien bien sûr des représentations humoristiques, comme ces moines qui font bombance
peut-être se servaient-ils de cette gourde ?
et de cette canne tire-bouchon ?
Voici un code pénal à méditer
comme cette mise en garde contre la soulographie
Cette affiche, très datée 3ème république,, et particulièrement réactionnaire, est due à l’illustrateur et caricaturiste Achille Lemot
Puisqu’on est dans les alambics, en voici un plan :
Des alambics, il y en a!
La collection d’outils est impressionnante
Nous avons remarqué ces outils d’arrachage
et ces accessoires de cave (égouttoir, percefûts, pompe, robinets de fût-, vélo !)
Ici une machine de remuage, pour faire du champagne ?
Cette commune s’enorgueillit d’avoir été pendant deux siècles un haut-lieu de la culture du raisin de table en région parisienne. Les pieds de chasselas doré étaient cultivés sur espaliers le long de murs qui couraient sur plus de deux cents kilomètres tout le long du village. (en savoir plus ici)
Une fois cueillies, une innovation au milieu du 19eme siècle a permis de conserver les grappes, qui avaient l’extrémité de leur sarment plongée dans une solution d’eau et de charbon de bois en poudre, pendant plusieurs mois, et d’être servies jusqu’au printemps sur les tables des parisiens et jusqu’à la cour de Russie !
Si cette industrie a périclité avec les temps modernes, la mémoire en reste vive et une confrérie, la Confrérie Saint-Vincent de Thomery, la fait vivre, qui fêtait ce samedi 20 janvier la Saint-Vincent, patron de vignerons. Plus de 400 familles en font partie.
Une dizaine de confréries avaient répondu à l’appel, venues beaucoup des environs (St-Fargeau Ponthierry, Brie de Melun, Ville St-Jacques, Flagy…) et du nord de la Bourgogne voisine (Sens, Crèvecoeur, Villeneuve la Guyard, Villeneuve sur Yonne).
Mais aussi de les Echansons de France, venus de Paris, et le Clos de Clamart !
Au programme : défilé en musique des confréries,
les trompettes de l’aubépine de Champagne/Seine
messe, accueil du « bâtonnier » (chaque année un nouveau bâtonnier est désigné pour représenter la Confrérie), puis en route pour un vin chaud devant la maison du nouveau « bâtonnier »!
Beaucoup des participants se sont retrouvés ensuite aux « Tilleuls » pour un déjeuner aux petits oignons. Une bonne adresse !
Merci au Grand-Maître Michel Héluin et à toute la confrérie pour leur accueil, et pour maintenir cette tradition séculaire !
C’est à une conférence sur la vigne, de sa domestication à son amélioration génétique, que nous étions conviés par la Cité du Vin et ses « vendanges du savoir », le mardi 14 novembre dernier.
L’intervenant, Didier Merdinoglu, est chercheur à l’INRA de Colmar. Voici un résumé de son intervention qui nous a particulièrement intéressé.
Origine et évolution de la vigne
La vigne (vitacea), dont l’historicité remonte à plus de 60 millions d’années (pépins de la fin du crétacé retrouvés en Inde) , comporte 17 genres (vitis, cissus, parthenocissus…) et plus de mille espèces (V.silvestris, V.amurensis, V.berlandieri, V.rotundofolia…) dont une soixantaine du genre vitis où l’on distingue les sous-genres muscadinia et euvitis différant par leur nombre de chromosomes.
Au sein de euvitis, la « vraie » vigne, les espèces sont regroupées selon l’origine géographique européenne (vinifera, qui peut-être sauvage (sylvestris) ou cultivée (vinifera)), américaine, asiatique…
La vigne a été domestiquée par les premiers agriculteurs du néolithique, il y a près de 10 000 ans. Ils en tireront rapidement du vin (la lignée humaine, ainsi que certains primates, a acquis il y a 10 millions d’années la capacité à digérer l’alcool, avec l’activité des gènes de l’alcool deshydrogénase).
La vigne cultivée se distingue par son hermaphrodisme, la taille des grains et des grappes, son goût plus sucré, ses arômes… Depuis le Caucase, elle s’est diffusée le long du pourtour méditerranéen, du Danube, et aussi vers l’Asie, avec des évolutions locales, sans doute par croisements, notamment en Italie et en Espagne.
Peut-être 6000 cépages portant 12 à 15000 noms peuvent être aujourd’hui observés, fruits de l’évolution des cépages anciens, et d’une hybridation non intentionnelle.
Car ce n’est qu’au 19ème siècle que l’on commence à bien comprendre la sexualité des plantes, et que l’on peut parler d’hybridation intentionnelle, et ce n’est qu’au 20ème siècle, avec la découverte par Mendel des lois de l’hérédité, que l’on a les outils pour orienter les opérations.
On classe les cépages par rapport à leur période d’apparition : les « primitifs » (antiquité), les « anciens » (du moyen-âge), les « modernes » (17-19ème siècle) et les contemporains. Avec les connaissances actuelles sur l’ADN, on peut reconstituer les arbres généalogiques. On a pu ainsi montrer que le cabernet sauvignon est issu du cabernet franc et du sauvignon blanc, et que le merlot l’est du cabernet franc et du magdeleine des Charentes.
De même tout un ensemble de cépages apparus en Bourgogne comme le chardonnay, le gamay, le melon, l’aligoté… descendent du pinot et du gouais.
On découvre aussi le rôle du traminer (gewurz traminer en Alsace, savagnin blanc, à une variation près dans le Jura) qui est certainement un cépage « primitif », parent du pinot et du sauvignon blanc qui sont sans doute des cépages « anciens ».
Ce travail sur les cépages actuels est complété par des analyses de pépins archéologiques, qui ont permis de confirmer par exemple l’antiquité du savagnin blanc.
Un travail considérable réalisé récemment par une équipe chinoise et internationale sur plus de 3000 accessions (cépages cultivés et vitis sylvestris sauvages) a eu pour résultat de modifier notre vision de l’origine de la vigne. Les variétés de raisin de table du Proche Orient (et non du Caucase) seraient à l’origine, après croisement avec des variétés locales, des variétés cultivées et vinifiées dans la plupart des pays aujourd’hui.
Accéder à l’article « Dual domestications and origin of traits in grapevine evolution »
La crise phylloxérique
A partir du milieu du 19ème siècle, 3 fléaux, venus des Etats-Unis, s’abattent sur le vignoble européen : mildiou, phylloxéra, oïdium.
Les parades trouvées sont chimiques : soufre pour l’oïdium, sels de cuivre pour le mildiou, et génétiques : porte-greffes pour le phylloxera sur des pieds américains.
Une autre voie était la recherche d’hybrides résistants.
A partir des ressources génétiques (toutes les espèces du genre vitis, interfertiles avec la vigne cultivée), opérer des croisements (par exemple en éliminant la partie mâle et en pollenisant à partir un autre espèce), sélectionner les pépins produits, et recommencer plusieurs fois de suite jusqu’à obtenir le résultat désiré.
Les grands noms des hybrideurs français sont Georges Couderc, Albert Seibel, Steve-Villard, Vidal…
Plus faciles à cultiver, leurs produits on connu leur apogée au milieu du 20ème siècle, jusqu’à occuper le tiers du vignoble français, avant d’être dénoncés voire interdits pour mauvaise qualité ou risque sanitaire. La recherche en sera découragée en France, mais se poursuivra ailleurs comme en Allemagne où un cépage comme le Souvignier Gris, résistant à l’oïdium, fut mis au point en 1983.
On sait aujourd’hui qu’il existe des espèces particulièrement résistantes aux maladies. Tout l’enjeu est d’insérer les gènes correspondants dans la vigne cultivée, sans dégrader leurs qualités organoleptiques, par un processus d’introgression. C’est l’objectif du programme ResDur de l’INRAE.
Compte tenu du nombre de croisements nécessaires, de façon à ne sélectionner que les caractères souhaités, un des problèmes est la durée du processus, car un pépin n’est fertile qu’au bout de 3 ans en milieu naturel. Un mode de conduite a été élaboré permettant de réduire ce délai à moins d’un an.
On s’intéresse aux marqueurs moléculaires de la résistance qui peuvent être identifiés dès le début de la croissance, aux premières feuilles, et se concentrer sur les plants intéressants, qui sont alors implantés en vignoble, où une sélection intermédiaire, au bout de quelques années sera opérée. Les meilleurs candidats font l’objet d’une sélection finale, en vignoble, en partenariat avec l’Institut Français du Vin. Tout le processus prend au final une bonne quinzaine d’année. Les variétés Floreal, Voltis (blancs), Vidoc, Artaban (rouge) ont été finalisées en 2018.
Une deuxième série est apparue en 2021 : Coliris, Lilaro, Sirano, Opalor, Silanor
Ces hybrides ont une généalogie complexe, incluant des parents américains et asiatiques.
On constate une division par 10 des fongicides utilisés pour ces variétés résistantes. Devant ce succès, la plupart des interprofessions ont lancé leurs propres programmes de sélection, avec en vue la recherche de la typicité régionale. Sont également disponibles les variétés développées dans les pays voisins (Allemagne, Suisse, Italie).
L’avenir Avec le changement climatique, en 40 ans la date des vendanges s’est avancée de presqu’un mois en Alsace. La hausse des températures risque de modifier les qualités du raisin récolté (plus de sucre, moins d’acidité), et donc aussi celles du vin. Mais les cépages ne sont pas tout : outre la recherche de variétés végétales résistantes aux nouvelles maladies et adaptées au changement climatique, la viticulture doit aussi se pencher sur les méthodes de lutte contre les maladies (biocontrôle…), modes de culture…
Depuis quelques jours, toute la presse spécialisée en parle : des cochonnets venus de Nouvelle Zélande, les kunekune, sont à la manoeuvre pour pour désherber les rangs de vigne.
Car désherber est un vrai problème. Si l’enherbement est recommandé, pour le renforcement des sols, il faut bien, quand vient l’été, éliminer cette engeance avide d’eau et d’azote qui vient concurrencer la production des grappes. Mais la chimie a mauvaise presse (la tendance est à l’interdiction du glyphosate), et le travail mécanique nécessite de l’huile de coude coûteuse et peu disponible, du fuel, bref des coûts et de la pollution.
Dans certaines régions on a recours aux moutons qui viennent volontiers paître dans les vignobles, mais ils ne font que tondre l’herbe qui repart de plus belle à la moindre ondée.
Dans ces circonstances, il faut faire preuve de créativité ! C’est ce qu’ont fait des viticulteurs champenois et bordelais, en faisant appel aux kunekune, dont le nom en maori signifie rond et gros.
Ces petits cochons nains (mesurant une 40 aine de centimètres) se nourrissent essentiellement d’herbes. Trop petits pour s’attaquer aux feuilles, ils enfouissent leurs groins sous les mottes qu’ils déterrent, et avalent en passant les feuilles mortes porteuses le cas échéant de spores de mildiou. Disciplinés, ils parcourent les rangs en bon ordre. On connaissait le métier de promeneur de chiens, voici donc celui de promeneur de kunekune, un métier d’avenir ?
« On ne pourra pas tout révolutionner avec les cochons », mais ils sont un « complément », « un outil en plus pour les parcelles les plus difficiles », juge M. Bonnaire, un viticulteur champenois. Notamment « sur les sols en côteaux, où avec les orages, on perd quatre à cinq cm de terre par an ».
Il s’est finalement tenu, ce Symposium tant attendu. Nulle nième vague ne l’a contrarié, et quelques vingt-cinq confréries et associations franciliennes s’y sont retrouvées, dans ce joli village d’Auvers/Oise, pour partager des connaissances, parader, admirer des oeuvres artistiques mais aussi trinquer, faire bonne chère et la fête.
Si l’on se replace en novembre 2020, date où le comité d’organisation s’est pour la première fois réuni, il fallait avoir un sacré optimisme pour investir dans ce projet. Saluons donc Michel Devot, président de Cocorico, la municipalité d’Auvers/Oise et le Pressoir Auversois, association invitante, pour s’être lancés dans l’aventure.
Une fois montrée patte blanche (on aura compris qu’il s’agissait du passe sanitaire) la journée commença par des conférences sur des thèmes viticulturel, oenologique, historique, artistique et gastronomique.
Denis Boireau, un scientifique bien connu des amis du bon clos, fit le point sur les cépages résistants aux maladies de la vigne comme l’oïdum et le mildiou, fruits de recherches ancienne et récente,
et incita vivement les cultivateurs de vignes patrimoniales à s’y intéresser. (Nous avons déjà visité son « arboretum » d’Epinay/Orge.)
Gabriel Lepousez, neurobiologiste, chercheur à l’institut Pasteur et concepteur d’une formation à l’Ecole du Nez de Jean Lenoir, fit sensation en décrivant précisément les fondements anatomiques et physiologiques de l’olfaction : 400 capteurs, situés dans l’épithélium olfactif, permettant d’identifier des milliers (potentiellement des milliards) de molécules, sont reliés aux neuronesde la zone nasale du cerveau.
Encore faut-il avoir les bons gènes pour que ces associations soient activées. D’un individu à l’autre, on observe des seuils de sensibilité extrêmement variés, dans un rapport de 1 à 1000 voir plus. Le plus beau nez du monde ne peut donner que ce qu’il a ! L’entrainement n’y remédiera pas, mais il permettra (ce qui n’est pas rien) de mettre des mots sur ce qui est ressenti. Il décrivit également le phénomène de rétro olfaction, qui opère lors de l’ingurgitation et échappe donc aux dégustateurs qui recrachent le vin. Et il fit valoir que les neurones de la zone nasale du cerveau ont la faculté de se régénérer.
Michel Miersman, de la Confrérie du Clos Saint-Vincent de Noisy-le -Grand, est venu faire part de la démarche qui lui a permis d’écrire un livre sur 1300 ans d’histoire de la vigne et des vignerons de Noisy-le-Grand,
sans quasiment sortir de son bureau, tant il y a d’informations et de documents (comme le « terrier ») disponibles en ligne.
Robin Bourcerie, jeune musicien et musicologue auteur d’une thèse sur les airs à boire du 17ème siècle en exprima la substantifique moëlle en les situant dans le contexte des moeurs de l’époque :
types de vins, circuits d’approvisionnement et lieux de consommation, en mettant l’accent sur l’explosion créatrice (des milliers d’airs publiés dont 2425 analysés dans sa thèse) et l’importance du cabaret.
Enfin Thierry Bitschené, de la confrérie du Brie de Meaux, a présenté son fromage d’élection au moyen d’un petit film,
et invité les participants à s’en faire une idée plus précise lors du déjeuner qui s’ensuivit.
Après le buffet campagnard, qui valait bien celui du temps béni des Galeries Barbès,
l’heure est venue de se mettre en tenue pour défiler dans les rues d’Auvers,
ci-dessus Jean-Claude Pantellini, président du pressoir Auversois, entre à gauche Isabelle Mézières, maire d’Auvers/Oise, et à droite Martine Rovira, maire adjointe
et, au son des corps de chasse du Rallye Vau-Vent
et des cabrettes, accordéons et vielles de la Bourrée Montagnarde,
rallier l’église, immortalisée jadis par Vincent Van Gogh,
où une bénédiction attendait les quelques vingt-cinq confréries présentes.
C’est un autre Vincent qui tenait fièrement la bannière de Clamart.
De l’église, en longeant les vignes où sont Saint-Vincent et Bacchus,
, on partit vers la mairie où les véhicules du Vexin Classic paradaient à l’arrêt. On y retrouva la conseillère régionale Babette de Rozières, déléguée à la gastronomie, heureuse de retrouver les confréries.
Quelques heureux trouvèrent là une alerte guide pour explorer en privé les ruelles du village,
On aura reconnue Edith Monti, artiste peintre anversoise dont les lecteurs du bon clos ont déjà fait la connaissance et que nous remercions pour son accueil
découvrir le musée et les vignes Daubigny et pousser jusqu’à l’atelier du maître en passant au pied de l’escalier de Van Gogh.
Le reste de la troupe put découvrir la médiathèque où le dessinateur humoriste Michel Roman
et les enfants des écoles exposaient leurs oeuvres artistiques et poétiques.
Enfin vint l’heure du diner servi par le traiteur Bernard Dieu et animé par Frank Dorès, Léna et leurs danseuses.
Après les salamalecs et remerciements de tous ordres,
On reconnaitra au centre Pierre Douglas, avec sa gauche Isabelle Mézières, maire d’Auvers, puis J.C.Pantellini, président de Pressoir Auversois, et Michel Devot, président de Cocorico ; et à sa droite, Michel Mella, Jean-Pierre Gimbert, Marc Lesk, J.P.Faury et Martine Rovira, maire-adjointe
vint l’heure de la proclamation des résultats du concours des vins d’ile de France et de la remise des diplômes par l’accorte Edith Monti.
Le jury était présidé par Philippe Faure-Brac, meilleur sommelier du monde… 1992 et président de l’Union Française des Sommeliers, assisté de Laetitia Trouillet Martin, de l’institut oenologique de Paris. Avec 4 autres dégustateurs chevronnés, ils avaient eu à juger 51 vins des années 2019 et 2020, principalement des blancs, présentés par 23 confréries et associations, et ont décerné 3 médailles d’or, 7 d’argent et 8 de bronze et quelques prix d’encouragement.
Comme les résultats étaient annoncés en commençant par les diplômes de moindre importance, l’on pouvait lire sur les visages des premiers nominés la déception d’être appelés si tôt, et sur ceux de ceux qui ne l’étaient pas encore l’espoir, de plus en plus ténu au fur et à mesure des appels, de l’être pour une plus haute récompense… Dura lex sed lex!
les lauréats du concours des vins
Ce n’est pas si facile de faire un bon vin, le Bon Clos adresse ses félicitations aux médaillés, et ses encouragements à tous les participants !
On pourra voir les résultats complets sur le site de Cocorico.
C’est l’exposition présentée ces temps-ci à l’abbaye de la Celle, près de Brignoles dans le Var.
Cette abbaye, construite à l’époque romane, est bâtie sur le site d’une villa romaine du 2ème siècle productrice de vin, dont on a retrouvé le pressoir et le fouloir dans la cuisine de l’abbaye. Elle ressemblait peut-être à celle-ci ?
maquette d’une villa romaine à Cavalaire
L’exposition retrace cette exploitation systématique des campagnes durant l’époque romaine.
Avec leur fond plat, les amphores « Gauloise 4 » emplies de vin gaulois sont exportées dans tout l’empire romain et même au delà.
col d’amphore au bouchon de liège, port antique de toulon, 1er-2ème siècle
Mais il y avait toutes sortes d’amphores
de gauche à droite : dressel2-4 de narbonnaise, G2, G5, G4
Cette cruche poissée, (à l’intérieur enduit de poix), était présente sur toutes les tables des buveurs romains
Voici d’autres récipients, en céramique, ou en verre soufflé (modiolus, Toulon, 1er siècle)
Cette coupe sigillée représente Bacchus ivre
Voici aussi une intéressante pipette à vin, et une patère en alliage cuivreux (1er siècle), utilisée comme une louche pour le service et les libations
Cette serpette en fer torsadé devait servir dans les vignes
serpette à manche torsadé (la Crau)
On voit aussi quelques beaux objets décoratifs comme cette colonne à décor de rinceaux de vigne peuplés d’oiseaux (marbre blanc, 1er siècle, près de vienne)
et cette mosaïque représentant une scène de vendanges
Mais le clou de l’expo est la mosaïque du Vème siècle « les trois Grâces et Bacchus chez Ikarios », découverte à Vinon sur Verdon dans le domaine de Pèbre, et maintenant domiciliée à Manosque.
Elle évoque la légende d’Ikarios, cultivateur ayant offert l’hospitalité à Bacchus, qui en retour l’initia à la vigne et au vin. A gauche Bacchus, reconnaissable à sa thyrse, est auprès d’Ikarios qui tient des grappes de raisin. Au centre, les trois Grâces, qui personnifient le don, la dette et la reconnaissance.. A droite, Ikarios indique à un serviteur le bouc qui se goinfre de raisins et doit être sacrifié.
On peut y lire les deux vers du poète Martial :
« toi qui fronce le sourcil et ne lis pas ces lignes de bonne grâce, puisses tu, horrible envieux, envier tout le monde et n’être envié par personne ».
Un matin ensoleillé de juin, nous avions rendez-vous avec l’ami Denis, bien connu des lecteurs du Bon Clos, à l’AMAP d’Epinay/Orge, où sont des vignes hybrides résistantes récemment plantées, pour les faire découvrir aux responsables de Cocorico, la coordination des confréries d’Ile de France ou des dizaines d’amateurs s’épuisent à faire fructifier des vignes artisanales.
40 ceps, chacun placé sous la responsabilité d’un parrain ou d’une marraine de l’AMAP, ont été plantés : des blancs, des rouges, qui donnent des raisins à double usage (pour la table ou pour le vin), et ne nécessitant donc pas d’autorisation ni de déclaration d’aucune sorte, ni d’ailleurs de traitement ou d’amendement du sol.
Parmi les blancs, il faut citer l’Opaline (hybride du chasselas doré), le Phoenix, fruits de la recherche allemande ; l’Excelsior, hybride plus ancien, le suisse Palatina, et le Perdin produit par l’INRA.
Parmi les rouges, on trouve les anciens Oberlin et Baco, des centenaires, le Chambourcin, qui date des années 40, et le Rondo (Allemagne, 1964).
ci-dessus, un. amapien palissant son cep
Bien forts sont ceux qui seront capables de reconnaitre ces pieds tant une feuille de vigne ressemble à une autre !
Et quid du goût ? L’apéro généreusement offert dans les vignes nous fit découvrir un Oberlin au nez plaisant et à la bouche ample et fruitée.
Oui mais tout ça, c’est de la théorie, dira-t-on, car en pratique, ces vignes plantées en novembre 2018 doivent encore faire leurs preuves.
Nous verrons bien, et les viticulteurs amateurs de vignes franciliennes en suivront attentivement les résultats, pas plus tard qu’en octobre prochain avec la présentation prévue au Symposium des vignes d’Ile de France (le 23 octobre à Auvers/Oise, si tout va bien !)
Nous étions une bonne douzaine, ce vendredi 5 mars, à nous retrouver pour la taille annuelle au Clos Franquet où est la vigne municipale de Clamart. Notre mentor, le vigneron champenois Jean-Pierre Léguillette, après avoir rappelé les fondamentaux, veillait au grain et vérifiait le travail. On na taille jamais assez !
A gauche Nadine, A droite Claude, au centre l’homme invisible !
Une innovation cette année : la récupération des sarments pour le compost et l’usage de broyeurs.