Boire, ou ne pas boire… avec Boris Grebenchtchikov

Curieuse figure que celle de Boris Borissovitch Grebenchtchikov, « БГ », un des fondateurs dans les années 70 de la scène rock russe avec son groupe Akvarium, considéré aujourd’hui comme le grand-père du rock russe. Emule des Beatles et de Bob Dylan, compositeur prolifique,  « le plus grand poète-chanteur en langue russe vivant »  s’est intéressé aux philosophies orientales, et vit actuellement entre Paris et Londres quand il n’est pas sur la route avec son « never ending tour » à la mode dylanienne.

Ces jours-ci il chante à Marseille au théâtre Toursky (le 4),

et les 12 et 13 décembre il sera au Studio de l’Ermitage à Paris.

Avec la fougue de la jeunesse il a chanté la bière bien fraiche (Холодное пиво) : Album Арокс и Штёр  1982-86 )

Quelques années plus tard, il chante encore cette chanson, avec moins de fougue peut-être.

Les années passent, voici Gertrude (Album : Кострома Mon Amour, 1994).

Un cheval à tête de femme parcourt la ville, quelqu’un lui dit : « Ne buvez pas de vin Gertrude, boire n’embellit pas les femmes. A te saouler tu ne feras que dégoûter tes compagnons et amis. Accroche toi à l’ancre, elle ne te lâchera pas. Et si tu comprends que le Samsara est le Nirvana, alors toute tristesse passera. »

On pourrait croire la chanson inspirée par Hamlet (Gertrude, mère d’Hamlet, boit le vin destiné à empoisonner son fils). Cette splendide animation fait plutôt référence au Pays des Merveilles de Lewis Carroll

Не пей вина, Гертруда, Пьянство не красит дам. Напьешься в хлам – и станет противно Соратникам и друзьям.

Dans cette chanson, il est déconseillé aux femmes de boire. Quant aux hommes….

Dans les années 2000, le ton change, avec l’album Беспечный русский бродяга (le Vagabond russe insouciant ) paru en 2006, avec trois chansons mettant en scène le buveur insouciant, l’alcoolique obstiné (стаканы : les verres) et l’adulte résolu à s’en sortir (Мама, я не могу больше пить : Maman, je ne peux plus boire).

Мама, я не могу больше пить : Maman, je ne peux plus boire

Maman, je ne peux plus boire, Les patriotes diront que je suis faible, que je trahis ma patrie…
Mais je ne veux plus vivre dans le mensonge..
Le démon Alcool est à chaque porte

 Беспечный русский бродяга : le vagabond russe insouciant

Je suis un vagabond russe insouciant.
Depuis les rives de la Volga
J’ai mangé ce qu’on m’a donné et bu ce que Dieu m’a donné.
Aux chants du rossignol et du loriot.

J’ai bu à Saint-Pétersbourg et j’ai bu à Moscou.
J’ai bu à Kostroma et à Ryazan.
J’ai bu du Lagavulin et j’ai bu du Lafroig.
J’ai pris de l’herbe et des champignons…

Je me souviens que j’ai été tenté par un démon.
J’ai été tenté, bien sûr, mais je n’ai pas cédé.

Où que j’aille, il y a l’Eden tout autour.
Car je suis un vagabond russe insouciant.

Cтаканы : les verres

Ну-ка мечи стаканы на стол…
Все говорят, что пить нельзя,
А я говорю, что буду.

Jetez les verres sur la table. ..
Ils disent tous qu’ils ne faut pas boire,
mais moi je dis que je boirai.

Tôt le matin, quand il fait encore nuit
Et que tout le monde est encore au lit,
Pour savoir où aller,
Et comprendre pourquoi,
Descends tes cent grammes de vodka 
Et tu atteindras tes objectifs.

« БГ » a écrit des centaines de chansons, on trouvera leurs textes, avec des traductions en anglais, français, etc. sur le site lyricstranslate.com

Le calendrier des concerts est sur bg-aquarium.com/en/concerts

Pour aller plus loin : voir ici un article sur le rock en Russie

Gillette de Narbonne

C’est une opérette composée par Edmond Audran sur un livret d’Alfred Duru et Henri Chivot, que l’on peut voir ces jours-ci à l’Auguste Théâtre, montée par la Compagnie Fortunio.

Représentée pour la première fois le 11 novembre 1882 au Théâtre des Bouffes à Paris, son livret est inspiré d’une nouvelle du Décaméron de Jean Boccace : La femme vaillante, qui raconte la revanche d’une épouse sur son mari volage et inconséquent.

Si nous en parlons, c’est qu’il s’y trouve un bref air à boire qui a sa place ici.

En joyeux et bons militaires, buvons, chantons, festoyons mes amis !
Ici gaiement vidons nos verres, en attendant les ennemis !

En voici un enregistrement par la classe de chant du conservatoire de sarreguemines en 2017

Il faut aller voir ça ! Digué lé que vengué mon bon !

Pour les amateurs, la partition complète est sur Gallica

Un été lyrique

Bonnes pioches cet été pour les amateurs d’airs bachiques lyriques, avec La belle Hélène d’Offenbach montée à Bruniquel, et la Dame Blanche de Boieldieu à Saint-Céré. Et bien sûr Pomme d’api au festival d’ Avignon, dont nous avons déjà parlé

Frank T’Hézan et sa bande réunie chaque année à Bruniquel ne risquaient pas grand chose à monter cette Belle Hélène, joyau de la couronne des oeuvres du Maître, loufoquerie d’une grande finesse toujours actuelle, dans le cadre splendide du château et avec le concours de la population locale.

Emmanuelle Zoldan dans le rôle d’Hélène, ça tombait sous le sens, Dominique Desmons en Ménélas, ça promettait, mais Christophe Crapez en Achille, Jeanne-Marie Lévy en Ajax 2, Aude Fabre en Oreste, voila qui était inattendu… et réussi !

On ne peut pas hélas citer tous les participants de la troupe, qui eurent l’occasion comme d’habitude de prolonger le spectacle, au cours des fameuses tables d’hôte, de leurs facéties et morceaux de bravoure jusqu’à potron-minet.

Mais venons en au fait. La fatalité poursuit la belle Hélène de Sparte qui résiste tant bien que mal aux assauts du berger Paris, fils du roi Priam de Troie. Vénus furieuse de voir ses plans contrariés , met au coeur des femmes de Grèce un immense besoin de plaisir et d’amour… Les maris quittent leurs femmes, les femmes quittent leur s maris, c’est une débâcle générale.

(pour plus de détail voir le livret)

Nous sommes au début du 3ème acte, à Nauplie, au bord de la mer. Le choeur mené par Oreste chante

Dansons ! aimons ! 
Buvons ! chantons ! 
Et trémoussons-nous avec verve !… 
Gloire à Vénus ! 
Gloire à Bacchus ! 
Et foin de la chaste Minerve !..

En attendant le DVD, voici de quoi se faire une idée de cet air avec le choeur des musiciens du Louvre..

(A propos de DVD celui de la Vie Parisienne jouée l’an dernier (et qu’on a pu (re)voir au cinéma de Caussade) est sorti. On peut le commander là. On y retrouvera le baron, joué par Frank T’Hézan, dans la fameuse scène de la griserie.

le baron qui n’est pas encore tout à fait gris

Et comparer avec la version de 2013. (on pourra relire l’article publié à l’époque)

Montauban n’est qu’à quelques lieues de Bruniquel, et son musée Ingres Bourdelle mérite une visite. On peut y voir cette « enfance de Bacchus« , de Raymond Balze (1840)

et ce « Silène et les quatre saisons » de l’atelier de Jordaens (après 1640)

On peut admirer aussi ces « plaques Campana », céramiques antiques d’Italie centrale, du nom de leur collectionneur : des satyres vendangeurs et fouleurs. Un air de déjà-vu ?

Cette Bacchante au raisin d’Emile-antoine Bourdelle (1907)

Et ce « Nymphe et Faune » de Pierre-Paul-Léon Glaize (1861)

Filons maintenant vers le nord, pour retrouver le château de Castelnau-Bretenoux où se jouait la Dame Blanche de François Adrien Boieldieu, sur un livret de Scribe, d’après Walter Scott, créé en 1825 et qui connut un immense succès.

Nous ne détaillerons pas l’argument (le retour d’un héritier légitime aux yeux des paysans au moment de la mise aux enchères du château familial hanté par une mystérieuse Dame Blanche) et filerons à la grande scène de l’hospitalité qui voit le héros adoubé comme parrain d’un nouveau-né.

II faut rire, il faut boire à l’hospitalité. 
A l’amour, à la gloire,
Ainsi qu’à la beauté!

Une fois n’est pas coutume, le spectacle joué pendant la pandémie à Rennes a été mis en ligne, pour notre grand plaisir.

Merci !

Vert Vert

C’est un conte drolatique, Vert Vert ou les voyages du perroquet de la visitation de Nevers, poème héroïque publié en 1734 par Jean-Baptiste Gresset, dont le héros est un perroquet. Il fit grand bruit à l’époque, et eut une nombreuse descendance au théâtre, à l’opéra-comique mais aussi en peinture, et jusque dans des performances et expositions d’art contemporain (on parlera en fin d’article d’ Oral Texte)..

C’est l’opéra-comique d’Offenbach monté en 1869 qui nous intéresse ici, car il recèle un sympathique air à boire…

Mais racontons d’abord l’histoire : Vert Vert, perroquet ramené d’Amérique, est la mascotte d’un couvent de Visitandines à Nevers, tant il est prolixe en prières et paroles d’Evangile. Il parle latin!

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Le Perroquet Vert-Vert au couvent des Visitandines de Nantes, par Jean-Claude Rumeau

Mais, requis par un autre couvent, à Nantes, il est embarqué sur un bateau qui descend la Loire. Durant le long voyage, aux côtés de « deux nymphes, trois dragons, une nourrice, un moine, deux gascons », c’est à un tout autre langage qu’il est confronté :

car, les dragons, race assez peu dévote,
ne parloient là que langue de gargotte ;
charmant au mieux les ennuis du chemin,
ils ne fêtoient que le patron du vin ;
puis les gascons et les trois peronelles
y concertoient sur des tons de ruelles :
de leur côté, les bateliers juroient,
rimoient en Dieu, blasphémoient et sacroient.

On imagine la suite : Vert perd son latin et ne fait que jurer, grand scandale au couvent ; on le renvoie à Nevers, où on l’attend pour le juger. Le voilà encagé, privé de tout. Le châtiment fait son effet :

Couvert de honte, instruit par l’infortune…
…l’oiseau contrit se reconnut enfin :
il oublia les dragons et le moine ;
et pleinement remis à l’unisson
avec nos sœurs, pour l’air et pour le ton,
il redevint plus dévot qu’un chanoine.

Las. Le retour à la vie de plaisirs va lui être fatale :

Du sein des maux d’une longue diette,
passant trop-tôt dans des flots de douceurs,
bourré de sucre, et brûlé de liqueurs,
Ver-Vert, tombant sur un tas de dragées,
en noirs cyprès vit ses roses changées.

Vert Vert meurt, et c’est là qu’Offenbach a choisi de faire commencer son histoire.

Son Vert Vert est un jeune homme, neveu de la directrice du couvent où vient de mourir le perroquet. Peut-être sa réincarnation ? On ne racontera pas l’argument en détail, il suffit de savoir qu’il y a des amoureux, des couples qui veulent se retrouver, et comme dit la RTBF, « on y retrouve des personnages truculents et des quiproquos dans une ambiance très vaudevillesque. »

On se retrouve ainsi à la fin du 2ème acte (scène 14) dans une auberge où l’on va découvrir les talents vocaux de Vert Vert, requis par Corilla la chanteuse de remplacer au pied levé un chanteur défaillant.

Allons ! du vin partout et des chansons légères !
Et ceux qui le voudront pourront casser leurs verres !
Au diable les belles manières, Avec nous, Avec eux, jamais de façons !

Amusons-nous, gais compagnons,
A la dragonne, entre dragons !
Buvons ! chantons !

Et pif ! et paf ! et versez donc, Madame l’hôtelière !
Vos deux mains sont-elles de plomb ? Vous ne les levez guère.
Si la bouteille que voilà ! Est trop lourde, ma chère,
Donnez ! chacun se chargera De la rendre légère !

vient la Chanson

VERT-VERT.

Quand du flacon en flots d’or il s’échappe
Comme un reflet du chaud soleil,
Dont les rayons ont fait mûrir la grappe,
Que j’aime à voir ce vin vermeil.
Je bois à vous, ma belle dame !

LA CORILLA.
Beau cavalier ! je bois à vous.

VERT-VERT.
Le présent enivre mon âme !

LA CORILLA.
Et l’avenir sera plus doux !…

ENSEMBLE.
Versez ! amis ! versez ! toujours !
Ce vin béni par les amours !…

LA CORILLA.
Tout en chantant l’amour et la jeunesse
Buvons ce vin qui vient de loin.
Et de chasser l’importune tristesse,
Gaîment remettons-lui le soin !

VERT-VERT.
Je bois à vous, ma belle dame !

LA CORILLA.
Beau cavalier ! je bois à vous !

VERT-VERT.
Le présent enivre mon âme,

LA CORILLA.
Et l’avenir sera plus doux !

ENSEMBLE.
Versez ! amis ! Versez, toujours.
Ce vin béni par les amours.

Etc.

Signalons le CD d’ Opera Rara selon l’édition de J.C.Keck

Concluons en signalant que les amateurs d’art contemporain ont jusqu’au 23 juillet 2022 pour visiter l’exposition Oral Texte à la Fondation Pernod Ricard , qui propose de revenir sur les origines du langage articulé avec les propositions d’une douzaine d’artistes comme Angélique Buisson qui s’est inspirée du conte de Vert Vert.

Voici des extraits de l’opéra Vert Vert, par Perez et Angélique Buisson

Un disque vinyl et des fichiers audio haute définition sont disponibles sur le site de Duuu éditions

-> et le 6 juillet, performance de Perez  sur une proposition de Angélique Buisson + lancement du vinyle Vert Vert édité par *Duuu

A la santé du général !

C’est le toast porté par les personnages des P’tites Michu d’André Messager au Général des Ifs, venu retrouver sa fille laissée pour cause de veuvage et d’ obligations militaires aux bons soins de la famille Michu.

On a pu le voir en ce début avril sur la chaine Culturebox, jouée par les Brigands. Dommage qu’elle ne soit plus en ligne.

(Au lever du rideau, un punch flambe sur une table au milieu du salon.

Les invités, le verre en main, entourent le général)

A la santé du général !

Que l’on vide gaîment son verre !

Fêtons ce guerrier martial !

Fêtons ce brave militaire !

A la santé du général !

On peut écouter la musique sur Spotify.

Les P’tites Michu ont été créées en 1897. Pour une analyse détaillée et le livret, voir le site Artlryiquefr https://www.artlyriquefr.fr/oeuvres/Ptites%20Michu.html

Fortunio

Il se joue ces jours-ci à l’Opéra Comique Fortunio, cette opérette composée par André Messager en 1907. C’est une adaptation du Chandelier d’Alfred de Musset, une pièce assez licencieuse et drôle publiée en 1835, et jouée à la Comédie française en 1850.

fortunio

Comment déjouer les soupçons d’un mari jaloux ? En les faisant dévier vers un leurre, le chandelier. Mais quand celui-ci est un amoureux transi, Fortunio, et qu’il chante une chanson écrite par Musset, tout peut arriver…

Il y a un petit air à boire au début du 3ème acte, un peu ampoulé, ce n’est pas l’air le plus connu mais il a sa place dans la collection du Bon Clos. C’est le mari trompé, maître André, qui invite ses convives à boire :

Coteaux brûlants,
Terre des champs,
Et des verdures,
C’est votre sang
Qui monte dans
Les vignes mûres.

Cieux empourprés,
Couchants dorés,
Des soirs d’automne,
Tout votre éclat
Tient ici-bas
Dans une tonne.

(Ce n’est pas celui évoqué par Musset dans le chandelier : « Amis buvons, buvons sans cesse », une chanson jugée trop vieille par le capitaine Claveroche (l’amant) ; nous en reparlerons)

Dès 1861, Offenbach avait composé la Chanson de Fortunio, un opéra comique qui raconte une suite de cette histoire. Fortunio, devenu âgé, se retrouve dans la situation du mari du Chandelier… Mais sa vieille chanson, qui avait fait défaillir la belle Jacqueline, le trahira…

On a donc deux airs pour une même chanson, celui d’Offenbach qui eut en son temps un succès retentissant,  et celui de Massenet. Chacun choisira…

On peut écouter là la version d’Offenbach (avec Bruno LAPLANTE, baryton et Marc DURAND, pianiste)

et celle de Messager

Si vous croyez que je vais dire
Qui j’ose aimer,
Je ne saurais pour un empire
Vous la nommer.

Nous allons chanter à la ronde,
Si vous voulez,
Que je l’adore, et qu’elle est blonde
Comme les blés.

Je fais ce que sa fantaisie
Veut m’ordonner,
Et je puis, s’il lui faut ma vie,
La lui donner.

Du mal qu’une amour ignorée
Nous fait souffrir,
J’en porte l’âme déchirée
Jusqu’à mourir.

Mais j’aime trop pour que je die
Qui j’ose aimer,
Et je veux mourir pour ma mie,
Sans la nommer.

la princesse de Trébizonde

Encore une belle opérette du génial Jacques Offenbach dont on fête cette année le bicentenaire. L’équipe qui se réunit chaque été à Bruniquel autour de Frank T’hézan et de Jean-Christophe Keck a présenté ce joli spectacle dans le cadre unique du vieux château. Pour notre plus grand plaisir, nous y étions.

princesseabruniquel.JPEGEt ne sommes pas passés à côté de l’air à boire qu’on y trouve au 3ème acte.

Zanetta (la Soprano Julia Jérôme) et Raphaël (Xavier Mauconduit, Ténor) se déclarent enfin leur amour et se retrouvent enfin pour festoyer…

RAPHAEL.
I
Ô malvoisie
Liqueur choisie
Sois l’ambroisie
Des amoureux !
Coule et, pour cause,
Fais-nous en rose
Voir chaque chose !
Quel bouquet merveilleux
À ce vin vieux !
Parlons peu, mais parlons bien
S’en cacher ne sert à rien
Ici chacun à son tour
Est l’esclave de l’amour.
ZANETTA.
II
Ô vin de Grèce
Que ton ivresse
En allégresse
Tienne nos cœurs !
Rends le mien ferme,
L’amour y germe.
L’amour renferme
Tous les bonheurs !
Quel bouquet merveilleux
À ce vin vieux !
Pour retrouver l’ambiance, voici aussi un extrait posté sur Youtube par un amateur
https://www.youtube.com/watch?v=Dc2_Jikrvyw

Fête des vignerons à Vevey

vevey2019

Voici quelque temps qu’on s’y préparait. Pensez donc, des vignerons qui font la fête une fois par génération. Vient le moment où l’on se dit : c’est maintenant ou jamais !

La tradition remonte à 1797. Il s’agissait, et il s’agit toujours de récompenser les « tâcherons » les plus méritants lors d’une Cérémonie du Couronnement. Déjà un spectacle, mettant en scène le cycle de la nature et les divinités païennes, était organisé.

bacchus1833
le char de Bacchus en 1833

L’édition suivante eut lieu en 1819, puis ce fut en 1833,1851,1865 et 1889.

 

bacchus1851

Puis au XXème siècle en 1905,1927,1955, 1977 et 1999.

Vevey1905

Quelques uns des timbres édités par Nestlé en 1905

nestlevendangeurs1905nestlelautomne1905nestlebacchus1905

 

Cette pierre sur la place du marché où est édifiée une arène éphémère célèbre ces festivités.

Veveypierrecommémorative

Le spectacle est inénarrable. Plus de 5000 figurants vêtus de costumes chatoyants d’étourneaux, de papillons, de cartes à jouer…  se relaient pour des chorégraphies monstres.

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« Le spectacle raconte une année dans la vie de la vigne à travers une vingtaine de tableaux ouvrant et se terminant par les vendanges. Il traite autant des travaux de la vigne (effeuilles, taille), de moments plus sociaux (le mariage, la foire de la Saint-Martin) que de thèmes plus généraux (les saisons, l’eau, le soleil, la lune, le cosmos).
Il interroge le lien entre l’homme et la nature et rend hommage au savoir-faire immémoriel des vignerons-tâcherons. Au cœur du spectacle surgit le Couronnement des vignerons-tâcherons récompensés pour l’excellence de leur travail par la Confrérie des Vignerons.
La narration est portée par un émouvant dialogue entre une petite fille appelée Julie et son grand-père, qui lui fait découvrir les traditions et le travail de la vigne. Trois personnages de «docteurs» commentent le tout avec humour et impertinence. La musique, qui alterne morceaux d’ensemble, orchestraux ou en petites formations, est portée en live par le Chœur de la Fête (500 choristes, 300 Percuchoristes, 150 voix d’enfants), l’Harmonie de la Fête (120 musiciens de fanfares), le Big Band (16 musiciens de jazz), les Percussionnistes (40 percussionnistes), les Cors des Alpes (36 cors des Alpes), un Petit Ensemble (20 musiciens) et les Fifres et Tambours (36 musiciens bâlois). L’Orchestre de la Fête est le Gstaad Festival Orchestra, qui enregistre la partition en studio au printemps 2019.
Les chorégraphies des tableaux sont interprétées par 5500 acteurs et actrices-figurant-e-s en costumes, tous habitants de la région. Spectacle total, féerique, grandiose, dynamique et poétique conçu à 360°, il mêle à la musique, aux chants qui portent les poèmes des auteurs et aux mouvements de foule, des images et vidéos projetées tant sur des écrans géants que sur l’immense plancher LED de l’arène.
Pour créer les quelques septante costumes différents que portent les acteurs et actrices-figurant-e-s et les choristes, la costumière s’est inspirée autant des Fêtes des Vignerons précédentes, avec un intérêt tout particulier pour les aquarelles d’Ernest Biéler en 1905 et 1927, que des costumes traditionnels vaudois et fribourgeois. Les costumes d’animaux, insectes et oiseaux, sont des nouveautés liées à la dramaturgie du spectacle de Daniele Finzi Pasca. »

Tandis qu’une libellule vole au-dessus du public,

lalibellulechorales quadriphoniques (aux 4 coins de l’arène), percussions,

percussions

cors alpins…  gymnastes, viennent célébrer la vigne et la vie paysanne et témoigner de la grandeur de la Suisse et du canton de Vaud. Tous défileront avec fierté le 19 juillet en faisant pavoiser les armoiries des communes et cantons.

 

Armoiries de quelques villages viticoles

 

 

Les photographes amateurs s’en donnent à coeur joie, et participants et spectateurs fraternisent…

fraternisation

Le soir, on se retrouve dans les caveaux des corporations et confréries professionnelles.

aucaveaudesmarinspecheurs
au caveau des marins-pêcheurs

Les Cent Suisses, des passionnés, sont les héritiers des mercenaires suisses qui servirent notamment les rois de France,  et veulent perpétuer l’histoire et la culture suisse. Ils participent à la fête depuis 1819.

 

Et l’on boit des vins blancs (chasselas le plus souvent)  et rouge (gamay,  parfois croisé  avec le reichensteiner (gamaret, garanoir), ou aussi le plant robert, variété épicée de gamay, lauréat de notre dégustation).

 

Des vins plaisants, mais difficiles à produire, et suisses, donc chers et qu’on ne verra guère à l’export ! Il faut donc en profiter sur place, coûte que coûte ! Et d’abord parcourir le vignoble, qui dévale les coteaux face au Léman.

vignoblelavaux

De village en village, de clos en clos les enseignes se succèdent.

 

 

et l’on peut croiser un vendangeur en bois.

vendangeurenbois

On admire le travail de l’artiste qui a sculpté sur le bois de cette porte l’effigie d’un aieul vigneron.

visageaieul

A Chexbres tout est prévu…

 

De retour à Vevey, on ne rate pas l’exposition de gravures d’Olivier Taramarcaz qui illustre l’ouvrage « Méditations viticoles – la vigne et le vin dans la Bible » de Nathalie Perrot.

cepceps

Et faute de visiter le musée historique fermé pour la circonstance, on se rabat sur l’Alimentarium proposé par Nestlé.

museedelalim

N’oublions jamais l’alcoolisme et ses ravages !

 

 

le boulon

Dimitri Chostakhovitch composa en 1930 ce ballet, chorégraphié par Fedor Lokhudov, qui mettait en scène quelques héros négatifs, comme cet ouvrier ivrogne
et ce tire-au-flanc

(on peut voir ces dessins de Tatiana Bruni à l’exposition Rouge, actuellement au Grand Palais)

Las, le ballet fut interdit à l’issue de sa première représentation en 1931. Il fallut attendre 2005 pour qu’il soit monté de nouveau par Alexeï Ratmanski et la troupe du Bolchoï.

Voici un des grands moments, la  danse de Lyonka

 

le postillon de longjumeau

Voici un petit air à boire qui passe vite au 2ème acte du Postillon de Longjumeau, opéra-comique que l’on peut voir ces jours-ci salle Favart, qui fut composé en 1836 par Adolphe Adam (que les lecteurs du bon clos connaissent pour un air extrait du Chalet).

Ce n’est pas l’air le plus fameux mais il est joyeux. Après avoir été « enlevé » le jour de ses noces par un marquis pour chanter à la Cour du roi Louis XV, Chapelou, le Postillon de Longjumeau rebaptisé Saint-Phar, se voit convié avec toute le troupe à un festin, ce qui déclenche un enthousiasme général !

A Table ! A Table !

Le vin donne au chanteur
Et du charme et de la vigueur!
Ah! Monsieur le Marquis
Vraiment, on n’est pas plus aimable!
Allons amis, allons nous mettre à table! Allons amis, courons nous mettre à table!
Le vin donne au chanteur
Et du charme et de la vigueur!
Vraiment, on n’est pas plus aimable!
Allons amis, et nous boirons à table,
A la santé de Monseigneur!
Allons à table et nous boirons de grand coeur,
A la santé de Monseigneur!

On peut l’écouter sur cette video à 1h5mn20s