Voici une oeuvre d’Antoine Bourdelle représentant Beethoven, sur laquelle sont gravées ces paroles attribuées au génial compositeur :
« Moi je suis Bacchus, qui pressure pour les hommes le nectar délicieux. »
Cette citation invite à la réflexion : pourquoi diable Beethoven s’identifie-t-il à Bacchus?
Ces mots ont été rapportés par Elizabeth Brentano, alias Bettina von Arnim, dans une lettre à son ami Goethe, après avoir rencontré Beethoven en 1810. Citons-en plus exhaustivement les paroles :
(in Goethe et Bettina correspondance inédite t2 trad. Seb. Albin Paris 1843)
« je méprise le monde qui ne comprend pas que la musique est une révélation plus sublime que toute sagesse, que toute philosophie ; qu’elle est le vin qui inspire les créations nouvelles? Moi je suis le Bacchus qui pressure pour les hommes ce nectar délicieux ; c’est moi qui leur donne cette ivresse de l’esprit, et quand elle a cessé, voila qu’ils ont pêché une foule de choses, qu’ils rapportent avec eux sur le rivage. »
Voici donc la réponse à notre question : en identifiant la musique qu’il vénère au vin, Beethoven honore l’un et l’autre, qu’il place au-dessus de toutes les créations humaines.
Et voici aussi quelqu’un qui se croyait (sans doute à raison) « sorti de la cuisse de Jupiter », ce n’est pas si courant ! Peut-être un peu forcé car il y a plus d’un compositeur de la trempe de Beethoven (enfin, ça se discute), mais un seul Bacchus ! On lui pardonne, notamment pour ses chansons à boire, mais pas que !
Nous en connaissions quelques unes, en voici d’autres…
la première est un trinklied, un chant d’adieu qui date de 1792 (WoO109)
Erhebt das Glas mit froher Handund trinkt euch heitren Mut.Wenn schon, den Freundschaft euch verband,nun das Geschicke trennt,so heitert dennoch euren Schmerzund kranket nicht des Freundes Herz.Nur trinkt, erhebt den Becher hoch,ihr Bruder, hoch und singt nach treuer Freundeweisem Brauch und singt das frohe Lied.Uns trennt das Schicksal,doch es bricht die Freundschaft treuer Herzen nicht.
la deuxième un punchlied ( WoO 111)
Wer nicht, wenn warm von Hand zu Hand
der Punsch im Kreise geht,
der Freude voll’re Lust empfand,
der schleiche schnell hinweg.
Wir trinken alle hocherfreut,
so lang uns Punsch die Kumme beut.
(Nous buvons dans la joie ce punch qui passe de main en main…)
Prosit, Ludwig !
Bourdelle, Beethoven, Bacchus, Brentano, Bettina, Boeldieu (du nom de l’amie du clos qui nous a signalé cette oeuvre), étonnant, non ? On en reste Bouche Bée !