Il y a dans le roman médiéval Perceval le Gallois (vers 1180 et suivants, manuscrit de Mons, publié par Ch. Potvin) un curieux passage qui a attiré notre attention.
Un chevalier se présente devant le roi Arthur, porteur d’un cor « d’ivoire à 4 bandes d’or, moult beles et moult gracieuses« . « faites le remplir d’eau de fontaine qui soit claire et saine, elle deviendra du vin, des plus chers et des plus fins« .
Mais il y a un hic. « Nul ne pourra en boire sans en répandre sur soi qui aura trompé sa femme ou été trompé par elle« . Ambiance ! On laissera le lecteur du bon clos imaginer la suite, ou la lire dans le texte. (ce dictionnaire d’ancien français peut être utile)
Il s’agit d’une légende d’origine orientale assez répandue, nous dit M. Mazuy, dans sa traduction du Roland furieux de l’Arioste ; (celui-ci l’aurait trouvé dans Tristan).
On la trouve aussi dans la chanson de geste Huon de Bordeaux. La Fontaine en fera une comédie (la coupe enchantée) et un conte
où il conseille à un cocu de mettre de l’eau dans son vin, pourrait-on dire !
Quand on l’ignore, ce n’est rien
Quand on le sait, c’est peu de chose.
Vous croyez cependant que c’est un fort grand cas:
Tâchez donc d’en douter, et ne ressemblez pas
A celui-là qui but dans la coupe enchantée.