Comment faire franche repue, boire et manger sans bourse délier ? C’est ce que l’on apprend en lisant
LA REPEUE DE VILLON ET DE SES COMPAIGNONS (oeuvre de quelque de ses disciples, parue vers 1480)
On apprendra en passant que le vin de Baigneux était en bonne estime,
(On lui emplit, pour faire fin, du très bon vin de Baigneux)
mais loin derrière celui de Beaune !
(Je demande du vin de Beaulne, qui soit bon, et non autrement)
«Qui n’a or, ny argent, ny gaige,
Comment peult-il faire grant chère?
Il fault qu il vive d’avantaige:
La façon en est coustumière.
Sçaurions-nous trouver la manière
De tromper quelqu’ung, pour repaistre?
Qui le fera sera bon maistre!»
Ainsi parloyent les compaignons
Du bon maistre Françoys Villon,
Qui n’avoient vaillant deux ongnons,
Tentes, tapis, ne pavillon.
Il leur dit: «Ne nous soucion,
Car, aujourd’huy, sans nul deffault,
Pain, vin, et viande, à grant foyson,
Aurez, avec du rost tout chault.»
Passons sur le poisson, les trippes, le pain, et voyons comme il fit pour le vin
La manière d’avoir du Vin.
Après qu’il fut fourny de vivres,
Il fault bien avoir la mémoire
Que, s’ils vouloyent ce jour estre yvres,
Il falloit qu’ils eussent à boire.
Maistre Françoys, debvez le croire,
Emprunta deux grans brocs de boys,
Disant qu’il estoit necessaire
D’avoir du vin par ambagoys.
L’ung fist emplir de belle eaue clère,
Et vint à la Pomme de Pin,
Atout ses deux brocs, sans renchère,
Demandant s’ils avoient bon vin,
Et qu’on luy emplist du plus fin
Mais qu’il fust blanc et amoureux.
On luy emplist, pour faire fin,
D’ung très bon vin blanc de Baigneux.
Maistre Francoys print les deux brocs,
L’un emprès l’autre les bouta;
Incontinent, par bons propos,
Sans se haster, il demanda
Au varlet: «Quel vin est ce là?»
Il luy dist: «Vin blanc de Baigneux.
—Ostez cela, ostez cela,
Car, par ma foy, point je n’en veulx.
«Qu’esse-cy? Estes-vous bejaulne?
Vuidez-moy mon broc vistement.
Je demande du vin de Beaulne,
Qui soit bon, et non aultrement.»
Et, en parlant, subtillement
Le broc qui estoit d’eaue plain
Contre l’aultre legierement
Luy changea, à pur et à plain.
Par ce point, ils eurent du vin
Par fine force de tromper;
Sans aller parler au devin,
Ils repeurent, per ou non per.
Aide à la compréhension
Ambagoys, ambages, finesses
Atout, avec
Béjaulne, niais
Per ou non per, pair ou non, quoi qu’il en soit
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