ma vie d’échanson

Nous évoquions récemment la Saint Vincent des Echansons de France du 26 janvier dernier. Ce fut une journée exceptionnelle, marquée par le concert du Souffle de Bacchus en l’église Sainte Colette des Buttes Chaumont le matin, par le chapitre au Musée du Vin auquel s’était joint la Jurade de Saint-Emilion, le soir.

On en trouvera une relation « institutionnelle » sur le site du Conseil, et une beaucoup plus personnelle ci-dessous.

Un grand moment !

Toujours sifflant, toujours buvant, toujours chantant
Le coeur content, je regardais filer le temps.
Un soir de mai, ou juin, était-ce un fait exprès ?
Sur mon chemin, hasard heureux, je rencontrai
Des ménestrels qui égrenaient quelques chansons
A boire. C’était des compaignons échansons
Qui se retrouvaient tard le soir dedans des caves
Pour ensemble exercer leurs voix aigües ou graves
Et écluser aussi quelques godets. L’affaire
Fut vit’ conclue. Top’ là ! Vingt amis m’embrassèrent.
De concert nous entonnons hymnes et rengaines
d’ivrogne, il n’y a là rien pour me mettre en peine.
C’est joie d’être convié à chanter et à boire
de vider maints flacons de glorieux terroirs !

Survient la Saint-Vincent. Ce saint homme n’est-il pas
Patron des vignerons ? Une messe, un repas
Voila ce qui convient pour fêter ce grand Saint.
Il faut autant qu’on peut obliger son prochain
Et ma nature impie saura bien s’y plier.
D’ailleurs ne dit-on pas  » la joie au chevalier »,
Quand il va goûter « Courte messe et long diner » ?
Passy vaut bien une messe, n’est-ce bien raisonner
S’Il nous garde en santé jusqu’après les vendanges ?
Nous voilà donc chantant sous le regard des anges
De Ses bienfaits rendant grâce car, qui le nierait ?
Fit-Il rien de meilleur que ce p’tit vin clairet ?


Venons-en au repas qui s’ensuivit. Un cu-
-Rieux chapitre en tenue nous aura convaincus
des mérites des vins de Saint-Emilion

S’il en était besoin. Revoilà l’occasion
Dans ces caves voûtées que nous affectionnons
De louer Saint-Vincent patron des vignerons
Noé qui but premier le jus de son raisin
Et Bacchus Dieu Puissant de la vigne et du Vin.

Nous prenons place enfin en de longues tablées
Selon un plan secret nullement dévoilé.
C’est un Haut Dignitaire * qui est mon vis à vis
Disons pour le situer qu’il a plutôt l’air vi-
F. A ma gauche deux prêtres entendus le matin
Qui voulaient eux aussi prendre part au festin.
A ma droite deux veuves (je n’en dirai point l’âge
Mais il n’était point bas).  Voyez vous bien l’ image ?
C’est un fort grand honneur me dis-je « In petto »
qui m’est fait car ici je suis incognito !
Ma nature loquace et prompte à l’ironie
Saura-t-elle se tenir en cette compagnie
Sans effrayer les dames et choquer les curés ?

* dont le nom est tapi quelque part dans ce texte

Mais on ne peut non plus bouche bée demeurer !
Allons ! brisons la glace et jetons nous à l’eau
Sous l’oeil inquiet des uns, celui gourmand des au-
tres en narrant l’histoire de cet explorateur
qui rencontre un lion bien loin de sa demeure.
Il se jette à genoux, psalmodie cette antienne :
« Faites que cet animal ait une pensée chrétienne »,
 Le roi des animaux en cette occasion
 s’exclama derechef, sans laisser d’illusion :
« Par ma barbe, Seigneur, Bénissez mon repas ! »
Tous s’esclaffent en choeur et je n’en connais pas
Qui ne vida son verre pour le remplir encor.
Il sera temps demain pour les Confiteor !

Un échanson se doit d’honorer bien les vins
Qui ce soir sont servis pour les mets les plus fins :
Qu’ils viennent de Lussac ou de Saint-Emilion
Tous ces brillants flacons appellent l’ovation.
Notre tablée leur livre une guerre sans merci.
Les langues se délient, fredonnant sans souci.
C’est que l’une des veuves, arrivée en retard,
Réclamait d’écouter malgré le tintamarre
les chansons entonnées en début de soirée.
Les prêtres sont ravis, tout bien considéré
Ils goûtent le bonheur qu’ils ne pratiquaient guère
de descendre de chaire pour faire bonne chère.
Les veuves oublieraient (mais tout en restant sages)
Leurs époux disparus pour un très long voyage.
Et l’auteur de ces vers,  le mécréant, l’impie,
bon chantre bon yvrogne, à demi assoupi,
rentra dans ses foyers, aux lèvres une chanson
en bénissant le Nom du Plus Grand Echanson.
 

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s