Habitué du Théâtre Monfort, il était difficile de passer à côté d’un spectacle avec un tel titre ! On y est est donc allé, sans trop savoir ce qui nous attendait, un petit spectacle d’une heure ou deux sans doute, assorti d’une dégustation peut-être ?
Erreur. A peine arrivé nous voilà avertis que le dernier métro est à 1h40 et qu’en cas de nécessité le premier est à 5h du mat. On croit à une blague, d’autant plus que le maître de cérémonie, un grand escogriffe frisé et sympathique, cultive une ressemblance de style avec Pierre Richard.
On prend place à des tables façon bistrot, sur lesquelles du raisin est servi, avec en main un verre sur lequel est gravé le titre du spectacle. Nous sommes plus de cent, et parmi nous Jérémie, de Télérama… Il y a des rugbymen, des joueurs de hand. Et des vignerons amis. Sept bouteilles sont là sous nos yeux, posées sur un comptoir, nos promises…
Le spectacle commence, ou ne commence pas. En tout cas Sébastien Barrier commence à parler. Il n’arrêtera plus. C’est un conteur intarissable. On comprend assez vite que son propos est une ode aux vins naturels, à ce pays, la Loire, où ils sont produits (et quel nul n’est censé ignorer …), à ces hommes et femmes qui le font, qu’il a rencontrés, qui sont devenus ses amis, qui lui ont tout dit d’eux et dont il nous dit tout, à son tour. Mais pas que, car les digressions sont nombreuses. D’ailleurs, une digression, à partir du moment où elle nous éloigne du sujet pour y revenir, n’est-elle pas une autre façon de le considérer ? On saura donc tout aussi de l’itinéraire de Sébastien, de sa passion pour le conte de rue, de sa participation au festival de l’art de la parole à Rennes, de sa Bretagne, et de son futur boulot : maire de Brest ! Il cite Perros, Jule Chauvet et son esthétique du vin (note ça Jérémie)… Mais tout celà n’est qu’une introduction.
Comment fait-il pour parler tant, si bien et sans se perdre ? Et d’ailleurs peut-on « répéter » un tel spectacle ? La réponse vient : il y a un plan, en forme de graphe !
Et nous, le public, comment faisons nous pour tenir ? Certes il parle bien, depuis déjà près de deux heures ! Et ce qu’il dit est intéressant, voire passionnant..
Les sept bouteilles bien sûr, qui nous sont promises, avec ce verre bien tangible, acompte d’un bonheur à venir, que l’on nous a remis et que l’on pourra garder !
La première (piège à filles du domaine des capriades) sera débouchée au bout de deux heures, avec un peu d’olivade. Pour déguster la seconde (miss terre), il faudra attendre une heure de plus ! Ensuite, il faudra subir un « trou indochinois », sorte de plongée dans l’enfer de la drogue, que Sébastien nous fait vivre à travers les écrits d’un malheureux qui peine des années à en sortir. Sébastien gueule, Sébastien souffre, et nous avec lui.
Nous voilà enfin maintenant au coeur du sujet : la vie de ses amis vignerons, comment ils le sont devenus, leur passion, leur manière d’être, le tout sur grand écran piloté par une tablette…
Onze heure trente : la troisième bouteille. On fait une pause. Ouf, on en a besoin pour souffler. On nous sert des délicieux gâteaux. Ca va peut-être s’accélérer ? Voici Sébastien dans les vignes, où il opère seul, les vignerons l’ont envoyer là pour qu’il ferme enfin sa grande gueule, dit-il. Et il sait tout de la taille, dont il ne nous épargne rien. Mais non, minuit sonne.
Mais qu’est-ce qu’on en a à faire de ces histoires de vignerons ? A regarder la figure christique de Sébastien nous magnétiser, la lumière se fait tout à coup : c’est LUI le sujet, le reste n’est que leurre. Messie laïque, il prêche pour sa paroisse (Lui, ses valeurs, sa justification). Le trou Indochinois, c’est sa Passion. Ces histoires de vignerons ? des Paraboles sur l’Amitié, l’Amour, la Volonté, la Nature… Et les sept bouteilles ? Son Sang. On sait enfin Qui nous buvons !
A une heure on ouvre la cinquième bouteille, un gamay, ce n’est pas mon cépage préféré.
A une heure quinze, re-pause ; épuisé, devant me lever tôt le lendemain, je me décide à regret à partir, en ayant le sentiment d’abandonner un frère. Je ne connaitrai pas la fin, à quelle heure, et combien de jusqu’au-boutistes ? Jérémie, lui , est toujours là. Peut -être le lira-t-on dans Télérama ? Pardon Sébastien, mais cinq heures de spectacle, ça suffit, non ?
PS On pourra voir encore ce spectacle du 21 au 23 mai 2015 au Théâtre Monfort.
(lire le commentaire pour un planning plus complet)
Petites précisions quant aux dates de tournée :
5 > 7 novembre 2014 – Le Gallia Théâtre / Saintes
5 décembre 2014 – Centre Culturel Agora / Boulazac
9 > 13 décembre 2014 – Théâtre de Cornouaille / Quimper
16 décembre 2014 – La Malamok / Le Guilvinec
9 > 10 janvier 2015 – La Coupole / scène nationale de Sénart
16 > 17 janvier 2015 – La 104 / Paris
11 > 12 février 2015 – Théâtre du Fil de L’eau / Pantin
13 février 2015 – La Grange Dîmière / Fresnes
20 mars 2015 – Théâtre Jean Lurçat/ scène nationale d’Aubusson
27 mars 2015 – Centre Culturel Liffré
28 > 29 mars 2015 – Espace Jacques Prévert / Aulnay-sous-Bois
29 > 30 avril 2015 – Les Sables d’Olonne
21 > 23 mai 2015 – Le Monfort / Paris
30 mai 2015 – Le Dôme / Saint-Avé
5 juin 2015 – Centre Culture Agora / Boulazac
12 > 13 juin 2015 – Le 104 / Paris
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