Sacré Philippe Meyer ! C’est toujours un délice d’entendre ce pince-sans-rire à la voix sucrée, dont on imagine qu’il se pourlèche intérieurement les babines des bons mots et autres facéties qu’il nous prodigue, mais on ne peut pas être toujours à l’écoute !
Heureusement, notre amie Isabelle veillait, et les lecteurs du bon clos qui auraient raté son émission pourront se délecter du programme qu’il a concocté sur France Inter le samedi 25 janvier dernier.
->L’émission peut être réécoutée jusqu’au 25 octobre 2016 à 12h ! suivez ce lien
C’est à un florilège de textes de Baudelaire (essai sur le Vin), Colette (que les lecteurs du bon clos ont déjà côtoyé), Alphonse Daudet (la mule du pape), Jean Le Houx, La Fontaine (l’ivrogne et sa femme), Corneille… et de chansons qui nous étaient souvent inconnues que nous sommes conviés. On en trouvera ci-dessous paroles et diverses interprétations.
D’abord Sommes nous des grenouilles, une merveille de chanson ancienne déterrée par le groupe Mélusine dans les années 70.
Elle était chantée, apprend-on là, lors de la fameuse descente de la Courtille à Paris lors du Carnaval.
La voici chantée par Chanson Plus Bifluorée
L’eau n’est bonne sur la terre
Que pour les fleurs d’en parterre
Les oignons et les poireaux
Les navets et les citrouilles…
Pourquoi boirions-nous de l’eau ?
Sommes-nous des grenouilles
Sommes-nous des grenouilles dans l’eau
Sommes-nous des grenouilles
Et pourquoi quoi
Et pourquoi quoi
Et pourquoi quoi
Quoi quoi quoi quoi quoi quoi
Pourquoi boirions-nous de l’eau
Sommes-nous des grenouilles
Fâcheux donneur de tisanes
Mèdecin tu n’es qu’un âne
Tu mériterais bourreau
Que chacun te chantapouille…
Pourquoi boirions-nous de l’eau ?
Sommes-nous des grenouilles…
Dieu des mers ton vaste empire
N’a pour nous rien qu’on admire
Il vaut mieux un noir caveau
Que le trône où tu patouilles…
Pourquoi boirions-nous de l’eau ?
Sommes-nous des grenouilles…
Jeune mâle à fleur de l’âge
Pour augmenter ton courage
Tu n’boiras pas dans un seau
Mais au tonneau qui gargouille
Pourquoi boirions-nous de l’eau ?
Sommes-nous des grenouilles…
Vieil arbre déchet morose
Crois-nous puise à forte dose
La goutte dans un tonneau
Du bon vin çà vous dérouille…
Pourquoi boirions-nous de l’eau ?
Sommes-nous des grenouilles…
Vous tous qui prêtez l’oreille
Retenez ce bon conseil
Et ne buvez jamais d’eau
Un bon vin ça ravigouille…
Pourquoi boirions-nous de l’eau ? Sommes-nous des grenouilles…
Et l’on continue avec Un p’tit verre du p’tit vin du pays, de l’opérette Méditerranée, chanté par la québecoise Aglaé, disparue prématurément en 1984
En toutes circonstances, à chaque évènement
Du jour de sa naissance à son enterrement
Qu’est-ce qu’on prend, qu’est-ce qu’on prend,
Qu’est-ce qu’on prend qui soit rouge ou bien blanc ?
Un p’tit verre du p’tit vin du pays
Un p’tit verre que l’on boit entre amis
Ça donne un air de fête à toutes les guinguettes
Et ça met du ciel bleu, tout bleu, tout bleu dans tous les yeux
Pour avoir du bonheur plein le coeur
Pour trouver toute la vie plus jolie
Le seul moyen au monde
C’est de boire à la ronde
Un p’tit verre du p’tit vin du pays
Si l’on sert du champagne dans les boîtes de nuit
Dans toutes les campagnes où le vin a mûri
Qu’est-ce qu’on prend, qu’est-ce qu’on prend,
Qu’est-ce qu’on prend qui soit rouge ou bien blanc ?
Un p’tit verre du p’tit vin du pays
Un p’tit verre que l’on boit entre amis
Ça donne un air de fête à toutes les guinguettes
Et ça met du ciel bleu, tout bleu, tout bleu dans tous les yeux
Pour avoir du bonheur plein le coeur
Pour trouver toute la vie plus jolie
Le seul moyen au monde
C’est de boire à la ronde
Un p’tit verre du p’tit vin du pays
Un p’tit verre, deux p’tits verres
Trois p’tits verres, cinq p’tits verres
Du petit vin du pays
On peut l’écouter sur musicme…
Puis vient la dernière bouteille de Gaston Couté, que nous connaissons, chantée par le groupe Five men in a boat. Nous avions publié la version de Bernard Lavilliers, voici celle de Gérard Pierron et Marc Robine
L’âme du vin de Baudelaire suit. Une version rare, chantée par Léo Ferré. Ce poème a inspiré plusieurs musiciens que l’on voir et écouter sur youtube par exemple.
Suit Billy le bordelais de Joe Dassin, à la gloire du Saint-Emilion ! Il en a fait de meilleures, mais elle est sympathique et on ne va pas s’en priver !
[Après bien des années des travaux, souterrains et désintéressés,
Delanoë et Dassin ont trouvé par hasard une chanson en or
D’un poète inconnu, musique du folklore.
Voici le document authentique et complet,
Il est intitulé: « Billy le Bordelais! »]
Dès sa naissance
C’est fou quand on y pense
Avec violence
Il refusa le lait
Que sa nourrice
Une fille sans malice
Venue de Suisse
Gentiment lui donnait
Car le bon vin de Saint Emilion
Ça vous donne un cœur de lion
A condition d’en mettre dans les biberons
C’était un bébé ni beau, ni laid
Avec des petits mollets
Mais déjà le monde l’appelait
Billy le Bordelais [qui?]
Billy le Bordelais
L’enfant terrible
Avait l’horreur morbide
De ce liquide
Que l’on appelle de l’eau
La plus mauvaise
Étant la flotte anglaise
Billy à l’aise
Nous vengea de Waterloo
Car le bon vin de Saint Emilion
Ça vous donne un cœur de lion
Ah qu’il était content le Napoléon
Il dit à Billy « Toi tu me plais
Pour tout ce que tu as fait
Moi je te donne la Bourgogne »
Billy le Bordelais [qui ça?]
Billy le Bordelais
De la Castille
A la mer des Antilles
Toutes les filles
De Billy raffolaient
Des Messaline
Des reines et des tsarines
Des Ursulines
Tout le monde y passait
Car le bon vin de Saint Emilion
Ça vous donne un cœur de lion
Pour trousser les jupons et les cotillons
Avec tous les enfants qu’il a fait
Je me demande si tu n’es
Ou si je ne suis pas bâtard de
Billy le Bordelais [qui?]
Billy le Bordelais
Messieurs, Mesdames
Voici la fin du drame
L’adieu aux armes
Laissez vos larmes couler
Billy l’unique
Billy le magnifique
C’est historique
Est mort assassiné
Car le bon vin de Saint Emilion
Ça vous donne un cœur de lion
Mais l’ennemi guettait le pauvre garçon
On lui a glissé dedans son verre
De l’eau à dose mortelle
Il est mort dans un dernier glouglou
Billy le Bordelou [qui?]
Billy le Bordeli [non!]
Billy le Bordelon [c’est vrai?]
Billy le Bordelais
[Envoi: Prince, Duc ou Marquis
Ou Monsieur de Bordeaux
Ton sang est fait de vin
Bien plus qu’il ne l’est d’eau
Aussi, je te dédie cette histoire attachante
Espérant que demain, toi aussi tu la chantes !]
Voici maintenant le duo I Bevitori de Donizetti, le douzième air des Nuits d’Eté à Pausilippe (quartier de Naples fameux pour ses soirées lyriques, apprend-on sur le site du contre-ténor Alain Aubin), chanté par Zehava Gal et Bruce Brewer
On pourra le réécouter sur Youtube par exemple (ici avec Teresa Berganza)
Mesci ! Mesci ! Mesci e sperda il vento ogni cura ogni lamento,
solo il canto del piacere risuonar fra noi s’udrà ;
nell’ebrezza del bicchiere sta la vera ilarità.
Mesci Mesci
Lunga è la ora degli affanni
Ha il piacer fugaci i vanni
il momento del godere brilla
e rapido sen va sen va
(Verse, verse, que le vent dissipe tout souci et tout chagrin, et que seul le chant du plaisir résonne en nous ! C’est dans l’ivresse des verres qu’est l’allégresse. Le temps du désir est long, celui du plaisir fugace, la jouissance ne dure qu’un instant, rapidement elle s’en va)
Traversons l’Atlantique ! La Bottine souriante chante J’aurai le vin.., un chant ben entrrainant ! l’écouter su musicme
PAR UN BEAU MATIN, JE ME SUIS LEVÉ (BIS)
DANS MON JOLI JARDIN J’ÉTÉ
REFRAIN :
J’AURAI LE VIN, LE VERRE ET LA BOUTEILLE
J’AURAI LE VIN LE VERRE À LA MAIN
DANS MON JOLI JARDIN J’ÉTÉ (BIS)
C’ÉTAIT POUR CUEILLIR DU RAISIN
J’EN AVAIS PAS CUEILLI TROIS GRAINS
QU’UN GROS CORBEAU À MOI S’EN VIENT
DIT EN FRANÇAIS , DIT EN LATIN
QU’UN VIN CLARET M’FERAIT DU BIEN
MOI QUI NE SAIS PAS LE LATIN
CES QUELQUES MOTS J’LES COMPRIS BIEN
Et enfin Maurice Chevalier, hélas ! comme dirait Gide, mais son Quai de Bercy est aux petits oignons !
Si vous suivez la Seine
Lorsque elle vous entraîne
Dans les quartiers riants de Passy
Si près de Notre-Dame
Comme une grande dame
Elle s’endort dans les quais fleuris
Nous, c’est près de Charenton
Qu’au son d’ l’accordéon
Des bistrots à flonflons
On s’ ballade à pas lents
Tout au long des chalands
L’estomac dans les talons
Parmi les fûts tout ronds
On se grise, oh, qu’ c’est bon
L’odeur du vin nouveau
Qui nous monte au cerveau
Quai de Bercy
Quai de la cloche
Sous les tonneaux de pinard
Sans un radis
Rien dans les poches
On respire le Pommard
Ah, ah, ah, le bon Dieu fait son vin pour les riches
Ah, ah, ah, mais le rêve est le vin des clochards
Quai de Bercy
Quai de la cloche
On n’a jamais le cafard
Pour bien être à la page
Faut savoir les usages
Chacune y vient avec son chacun
Bien que pour la bricole
I’ s’ fichent du protocole
Tous les fauchés connaissent le turbin
On flirte en humant l’ vin frais
On danse au beaujolais
On s’embrasse au Vouvray
Et au Saint-Émilion
Adieu jupe et jupon
Malgré qu’on soit dépurés
Tous les serments jurés
Le sont au Mercurey
Et pour devenir canaille
Y a rien d’ mieux qu’ l’extra-dry
{Parlé:}
Dis donc, ma cocotte, tu l’ savais qu’ j’avais l’ béguin pour toi, hein
C’est pour ça qu’ t’es venue c’ soir
Alors, viens, on va fêter ça en reniflant un p’tit coup d’ beaujolais
Viens, ma gosse ! Crois-tu qu’ c’est du vin, ça, hein ?
Ça rame ! Ha, ça c’est du populaire, hein !
Allez, au pommard maintenant, allez va !
Ah, ah, ah, dis donc, ça réchauffe, ce machin-là quand ça descend, hein ouille, ouille, ouille !
Ah, ah, ah, ça donne des idées, hein !
Quelles idées ? Ha, ha, attends, j’ vais t’ faire un dessin
Mais d’abord, on va s’ taper un p’tit coup d’extra-dry, à cause du mousseux, ha, ha !
Allez, allez, viens, viens, viens !
Quai de Bercy
Quai de la cloche
Sous les tonneaux de pinard
Sans un radis
Rien dans les poches
On oublie tous les trimards
Ah, ah, ah, le bon Dieu fait son vin pour les riches, dis, ma p’tite môme
Ah, ah, ah, mais l’ amour est le vin des clochards
Quai de Bercy
Quai de la cloche
On n’a jamais le cafard !
Nous terminons en publiant le poème de Jean Le Houx (1551-1616), parfois attribué (sous le titre l’insipidité de l’eau) à Olivier Basselin (1403-1470) dont il publia les oeuvres.
Ayant le dos au feu et le ventre à la table,
Étant parmi les pots pleins de vin délectable,
Ainsi comme un poulet
Je ne me laisserai mourir de la pépie,
Quand en devrais avoir la face cramoisie
Et le nez violet.
Quand mon nez deviendra la couleur rouge ou perse,
Porterai les couleurs que chérit ma maîtresse :
Le vin rend le teint beau !
Vaut-il pas mieux avoir la couleur rouge et vive,
Riche de beaux rubis, que si pâle et chétive,
Ainsi qu’un buveur d’eau ?
On m’a défendu l’eau, du moins en beuverie,
De peur que je ne tombe en une hydropisie ;
Je me perds, si j’en bois.
En l’eau n’y a saveur ; prendrai-je pour breuvage
Ce qui n’a point de goût ? mon voisin, qui est sage,
Ne le fait, que je crois.
Qui aime bien le vin est de bonne nature.
Les morts ne boivent plus dedans la sépulture.
Hé ! qui sait s’il vivra
Peut-être encor demain ? chassons mélancolie.
Je vas boire d’autant à cette compagnie :
Suive, qui m’aimera !
Merci pour toutes ces informations.
Concernant la chanson « sommes nous des grenouilles », vous auriez pu dire que son auteur est un certain Charles Panard, dont les vaudevilles ont fait fureur pendant tout le 18ème siècle !
Il commence ainsi : Fuyons le triste breuvage/Dont les poissons font usage;/ Des Dieux ce fatal fléau/ n’est que pour les niguedouilles…
Merci encore, votre blog, c’est le pied !
Charles
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